Sans m'attarder à Nakhon Ratchasima (capitale de la province du même nom), sitôt descendu du train avec mon vélo, je me suis lancé vers Phimai en débutant par un tronçon de l'insipide route 2.

Extrait sonore : Arrêt d’une minute pour le train de nuit

Le plateau de Khorat couvre la majeure partie de l'Issan (nord-est de la Thaïlande). La vaste région, particulièrement chaude et aride à cette période de l'année, englobe plusieurs provinces, dont celles de Nakhon Ratchasima, Buriram, Surin et Ubon Ratchathani, que je devais parcourir à vélo. Là, dans ce qui jadis se faisait appeler le « Haut Cambodge », on peut découvrir plusieurs ruines de sanctuaires khmers majestueux.

Prasat Hin Phanomwan.

Au nord-est de Nakhon Ratchasima, à moins de 5 km de la route 2, se trouve le Prasat Hin Phanomwan. Ce sanctuaire d'origine khmère est un curieux amalgalme de blocs qui paraissent de provenances et d'époques disparates, et qui ne s'emboîtent pas toujours parfaitement bien! Mauvaise reconstitution par des archéologues amateurs?

Ce piteux chien errant portait les mêmes couleurs que les pierres du Prasat Hin Phanomwan.

Un chien errant parmi les ruines du Prasat Hin Phanomwan.

Une pierre de bornage de la chapelle d'ordination des moines d'un petit monastère, situé près de la route 226.

Une fenêtre de la chapelle d'ordination des moines d'un petit monastère.

Une rizière noircie par la pratique du brûlis. L'aride plateau de Khorat ne permet qu'une seule récolte de riz par an.

En pénétrant dans l'enceinte du Prasat Hin Phimai.

Le Prasat Hin Phimai, un majestueux sanctuaire khmer admirablement restauré durant les années soixante, fut envahi dès 9h30 par plusieurs groupes de visiteurs Thaïs et occidentaux. Heureusement arrivé sur place dès l'aube, j'avais pu savourer pendant quelques heures paisibles l'atmosphère mythique du lieu.

La précocité de ma visite fut d'autant plus satisfaisante qu'elle m'a permis, pour un moment, d'éviter les groupes de jeunes visiteurs Thaïs, dont l'attention semblait souvent tournée plus vers moi que vers les monuments millénaires! Pas de quoi favoriser la contemplation! Pourtant, nombres de touristes occidentaux vinrent aussi sur le site, qui de toute évidence fait partie des grands circuits touristiques.

Prasat Hin Phimai.

Le Prasat Hin Phimai rappelle par son architecture le célèbre Angkor Vat, au Cambodge, mais il lui est antérieur, ayant été complété dès le début du XIe siècle.

D'impressionnantes structures de pierre, au Prasat Hin Phimai.

Le sanctuaire central du Prasat Hin Phimai, finement sculpté.

Prasat Hin Phimai.

Un pavillon du Prasat Hin Phimai aux pilliers massifs surplombe une rue de la ville de Phimai.

La tour centrale du Prasat Hin Phimai domine les environs.

La tour centrale du Prasat Hin Phimai siège au bout d'une des principales artères de la petite ville de Phimai.

La ville de Phimai, aux symétries presque parfaites, est encore cernée de murailles antiques. La tour centrale du Prasat Hin Phimai s'aligne parfaitement dans l'embrasure de la Pratu Chai, porte sud de la ville.

Sous les branches du banian géant.

Le jardin du Sai Ngam a pour principale attraction un banian géant âgé de 350 ans, étendu plus en surface qu'en hauteur, sous les branches duquel ont été aménagés des sentiers. Plutôt qu'à un arbre unique, les multiples troncs laissent croire à une forêt aux arbres particulièrement enchevêtrés!

Le canal qui borde l'ouest de la ville de Phimai, le Khlong Chakrai, asséché en cette saison, permet au bétail de brouter à l'ombre d'un pont.

D'éclatantes fleurs de lotus, dans un étang près de la route 2163.

Popote en bordure de la route 2163.

Puisque les clients sont souvent des réguliers des environs, la popote de bord de route est généralement aussi bonne que n'importe où ailleurs, mais ici, en bordure de la route 2163, le cuistot m'a servi l'omelette la plus cuite qu'il m'ait été donné de manger, avec un riz saupoudré de petites fourmis recroquevillées que je m'efforçais d'enlever lorsqu'il avait le dos tourné (afin de ne pas l'offusquer)…

De vastes étendues de brûlis, paysage commun de l'Issan en cette saison.

Au champ, des paysans mangent à l'ombre d'un arbre.

Le réservoir de Thung Laem.

Dans le réservoir artificiel de Thung Laem, situé à 4 km au nord de Nang Rong, des balises faites de brindilles et de bouteilles de plastique tronquées permettent aux pêcheurs de retrouver leurs filets, qui sont ancrés de manière à emprisonner les poissons.

Le réservoir de Thung Laem.

Un pêcheur en action, dans le vaste réservoir de Thung Laem, près de Nang Rong.

Entre Huai Thalaeng et Nang Rong, j'ai pris le risque d'emprunter des pistes non pavées et non identifiées. Je me suis bien rendu à Nang Rong, mais non sans demander les directions à des gens une bonne dizaine de fois! Tout ces gens furent très gentils, à l'exception d'un seul, occupé à gosser un bout de bambou, qui s'est borné à l'indifférence. Cet itinéraire n'était probablement pas plus court, mais certainement plus agréable que les routes 226 et 2073 que j'aurais autrement empruntées, plates, rectilignes, monotones, bordées de détritus.

Ces pistes, au contraire des grandes routes, étaient étonnamment propres, comme quoi les locaux, leurs seuls utilisateurs, prennent soin de leur environnement.

En route vers Phanom Rung, à l'aube.

Le Phanom Rung, un sanctuaire khmer édifié en grande partie au XIe siècle, était consacré au culte hindouiste, d'où cette sculpture de boeuf, monture de Çiva.

Dans l'enceinte du Phanom Rung.

Détails du sanctuaire central de Phanom Rung.

Les pierres du Phanom Rung, comme celles de la plupart des vieux temples, sont percées de trous qui servirent à leur manipulation lors de la construction.

Une fenêtre à balustrade et des bas-reliefs typiques de l'architecture khmère.

Ce fronton sculpté contribue à élever le Phanom Rung parmi les plus beaux monuments khmers de Thaïlande.

L'un des murs d'enceinte du Phanom Rung.

Le naga, serpent mythique, orne plusieurs monuments du Phanom Rung.

La remarquable allée processionnelle du Phanom Rung.

Un visiteur gravit l'escalier menant à l'enceinte centrale du Phanom Rung.

L'entrée ouest du Phanom Rung.

Détail du sanctuaire central de Phanom Rung.

Détail de la balustrade de l'un des trois ponts aux nagas du Phanom Rung.

Un pavillon du Wat Khao Angkhan, un monastère important de la province de Buriram, situé non loin de Lahan Sai.

Extrait sonore : Wat Khao Angkhan

La toiture d'un pavillon du Wat Khao Angkhan, ornée de dizaines de bouddhas.

Détail d'un bouddha du Wat Khao Angkhan.

Une roue bouddhique, au Wat Khao Angkhan.

Wat Khao Angkhan.

Une longue rangée de bouddhas, au Wat Khao Angkhan.

De jolies bottes de foin, près de la route 2075.

Une petite maison aux esprits, aux abords de la route.

Les quatre prangs du sanctuaire khmer de Prasat Muang Tam, bâti vers la fin du Xe siècle.

Prasat Muang Tam.

Les pistes non pavées ont souvent la couleur rougâtre de la terre du plateau de Khorat.

Extrait sonore : Diffusion matinale, à Ban Ta Miang

Une plantation d'arbres à caoutchouc, près de Ban Ta Miang.

Lorsqu'il ne se roule pas dans la boue pour se rafraîchir, le buffle broute!

Détail d'un mur du Prasat Ta Meuan, un sanctuaire isolé, situé tout près de la frontière cambodgienne. Les constructions de cette époque étaient faites sans mortier. Tout devait s'imbriquer parfaitement!!

À l'intérieur d'un bâtiment du Prasat Ta Meuan.

Un petit sanctuaire faisant partie du Prasat Ta Meuan.

Le sanctuaire délabré de Prasat Ta Meuan Thom.

Dans le secteur du Prasat Ta Meuan flottait une atmosphère des plus étranges. Après Ban Ta Miang, dernier village avant la frontière cambodgienne, on traverse sur 5 km une sorte de « No Man's Land », des terres semi-cultivées où règne un inquiétant silence de mort. La route y est large comme une autoroute mais ne mène pourtant nulle part. La ruine la plus reculée (et la plus proche du Cambodge), Prasat Ta Meuan Thom, est un curieux assemblage lézardé, aux allures d'un casse-tête de pierres inachevé… Il y avait là un groupe de cinq moines novices qui me fixaient lourdement, sans dire mot. Ils ne paraissaient pas particulièrement sages… J'ai aussi croisé des militaires en civil, qui jogguaient sur la large route. Ceux-ci étaient guère plus bavards que les jeunes moines, mais au moins souriaient… Préférer les militaires aux moines? Ça arrive!

Parfois des chiens, et même des petits chiots, sortaient de la forêt, comme surgissant de nulle part. Étaient-ils sans maîtres? L'affirmative ne serait pas étonnante en ce pays, mais il est plus courant de voir les chiens errer près des humains. La forêt cache peut-être plus d'habitants qu'on pense…

Des bas-reliefs du Prasat Ta Meuan Thom.

Un mur de grès et de latérite, au Prasat Ta Meuan Thom.

Près de Ban Ta Miang.

Un chemin sablonneux près du village de Phanom Dong Rak.

En route vers Prasat par des pistes anonymes, la petite boussole fixée au guidon de mon vélo fut fort utile!

« Qu'est-ce qu'y veut, ce drôle de mec sur deux roues? »

Le Prasat Hin Ban Phluang, un petit sanctuaire d'une majesté admirable, est situé à proximité de la petite ville de Prasat.

Un linteau sculpté du Prasat Hin Ban Phluang.

Un vaste réservoir artificiel, près de la petite ville de Prasat.

Une maison, près de Prasat.

Les trois prangs du Prasat Ban Palai, près de la ville de Prasat.

Des oranges ont été déposées en offrande, à l'intérieur d'un prang du Prasat Ban Palai.

L'un des pavillons du monastère qui voisine le Prasat Ban Palai.

Des graffitis, dans un abri aux abords de la route 2364, à l'est de Ubon Ratchathani.

Surtout ne pas s'imaginer que se faire adresser des « hello! » signifie que les « saluteurs » n'ont presque jamais vu d'occidentaux… Ceux qui en ont rarement vus ont plutôt d'autres réactions, telles que figer raide ou pouffer de rire. En fait, ceux qui saluent, notamment les enfants, sont tout bonnement affligés d'un curieux automatisme déclenché par la simple vue d'un farang! Ceci dit, c'est tout de même amusant quand trois bambins s'alignent au bord de la route à notre passage pour nous bombarder de « hello! » et de grands sourires.

Le lit d'une rivière asséchée, à l'est de Phibun Mangsahan.

Deux buffles se fondant dans le paysage aride profitent des dernières traces d'eau d'une rivière asséchée, à l'est de Phibun Mangsahan.

Vers Khong Jiam.

Le village de Khong Jiam, sur le Mekong.

C'est la saison des éphémères. Récemment il y en avait un peu à Bangkok, mais à Khong Jiam, ce sont de vastes nuées qui virevoltent partout. Ces insectes sont fort semblables aux « mannes » qui surgissent chaque début d'été à Montréal, sur les eaux du Saint-Laurent.

Ici, ces insectes ne sortent qu'entre 18 heures et 19 heures, avec une apothéose incroyable à 18h30. Sous chaque lampadaire illuminé du village se forment des colonnes d'insectes hautes de plusieurs mètres. J'ai pu fort bien observer le phénomène, car c'est précisément cette heure-là, n'écoutant que mon estomac, que j'avais malencontreusement choisie pour aller manger… Les éphémères me tinrent compagnie durant le repas, plongeant dans mon t-shirt, dans ma chevelure, dans mon riz… Vers 18h45, les employés du petit resto eurent la lumineuse idée d'éteindre la plupart des tubes fluorescents du local, une source lumineuse que semblaient particulièrement affectionner les éphémères…

Les insectes surabondants faisaient tout de même des heureux: les petits geckos, qui se tapaient un festin encore plus opulent que le miens!

Poissons grillés prêts à déguster, aux abords de la route menant à Chong Mek.

De jolis balais artisanaux en vente aux abords de la route, près de Chong Mek. Chong Mek, village frontalier, est le point d'entrée obligé pour Paksé et la province de Champassak, au Laos.

À propos des auteurs

De plus en plus, je m'intéresse aux lieux plus qu'aux paysages. Au-delà de l'attrait esthétique, ce sont les usages évidents ou cachés des lieux, leurs histoires passées ou futures, qui susciteront mon intérêt. Cette étincelle m'est indispensable et explique probablement pourquoi je pratique relativement peu la photographie au quotidien. L'étincelle ne peut s'allumer que lorsque je mets tout le reste de côté pour m'abandonner à la photo, en me laissant porter par le moment présent.

J'ai mille projets photographiques en tête, mais je ne les réalise jamais car une fois le repérage et la réflexion faits, une partie de la motivation est déjà consommée. Je préfère la démarche plus spontanée, où je passe en «mode photo» et me laisse inspirer par ce que je découvre. Ainsi, s'il émerge parfois des ensembles cohérents parmi mes images, ceux-ci s'avèrent le plus souvent accidentels! Je n'ai rien contre l'approche calculée, au contraire j'admire ceux qui la pratiquent, mais ça ne marche pas pour moi, peut-être parce que je dois déjà faire amplement preuve de discipline et de patience dans les sphères professionnelles de ma vie. J'exige de la photographie qu'elle me fasse rompre avec mon quotidien.