Cette série d'images n'est pas un portrait d'Halifax. Même si elle a connu quelques épisodes sombres dans son histoire, Halifax n'est, en réalité, ni plus sinistre, ni plus ténébreuse que n'importe quelle autre ville canadienne. Au contraire, les Haligoniens (les habitants d'Halifax) sont des plus accueillants. Tout au plus compte-t-elle, en raison de sa position stratégique sur la côte Atlantique, un plus grand nombre de lugubres vestiges militaires.

J'ai séjourné à Halifax en avril, possiblement le mois le plus long pour les Haligoniens, une sorte de prolongation de l'hiver. Il grisaille, il fait froid, les parcs sont boueux, les arbres dénudés sont encore en dormance, les oiseaux migrateurs sont encore dans le sud. Le printemps approche, mais il se laisse désirer dans un lent supplice sadique. Comme s'il fallait en ajouter, les incertitudes entourant la pandémie de COVID-19 enveloppent le quotidien d'une atmosphère inquiétante.

C'est dans ces conditions que j'ai simplement déambulé et laissé mon regard s'arrêter là où il le voulait bien, sans spécialement chercher à capter les lieux emblématiques ou à représenter fidèlement la ville. Le résultat est peut-être plus mon portrait affectif d'alors que celui d'une ville.

À propos des auteurs

De plus en plus, je m'intéresse aux lieux plus qu'aux paysages. Au-delà de l'attrait esthétique, ce sont les usages évidents ou cachés des lieux, leurs histoires passées ou futures, qui susciteront mon intérêt. Cette étincelle m'est indispensable et explique probablement pourquoi je pratique relativement peu la photographie au quotidien. L'étincelle ne peut s'allumer que lorsque je mets tout le reste de côté pour m'abandonner à la photo, en me laissant porter par le moment présent.

J'ai mille projets photographiques en tête, mais je ne les réalise jamais car une fois le repérage et la réflexion faits, une partie de la motivation est déjà consommée. Je préfère la démarche plus spontanée, où je passe en «mode photo» et me laisse inspirer par ce que je découvre. Ainsi, s'il émerge parfois des ensembles cohérents parmi mes images, ceux-ci s'avèrent le plus souvent accidentels! Je n'ai rien contre l'approche calculée, au contraire j'admire ceux qui la pratiquent, mais ça ne marche pas pour moi, peut-être parce que je dois déjà faire amplement preuve de discipline et de patience dans les sphères professionnelles de ma vie. J'exige de la photographie qu'elle me fasse rompre avec mon quotidien.