Le temps de changer d'avion, j'avais déjà foulé une fois le sol artificiel de l'immense aéroport de Hong Kong qui, grâce à un travail de remplissage colossal, s'étend là où jadis clapotaient les flots de la mer de Chine méridionale.
Cette fois, les lieux m'ont paru moins sévères, moins "Chine communiste mégalomane" qu'à ma première visite, même si la navette sous-terraine semble directement sortie d'un labo Russe des années 70.
Cette fois, j'ai remarqué quelques touches colorées dans la grisaille des lieux. Quelques tiges de bambou par-ci, quelques décorations aux couleurs de l'arc-en-ciel par là. Par ailleurs monochromatique, la spatieuse aérogare inondée de lumière naturelle est en fait superbe. À travers les hautes baies vitrées, on peut observer à loisir le ballet incessant des avions, sur fond d'îles spectaculaires au relief accidenté. Une aérogare infiniment supérieure à celle de Montréal, au minable aéroport de Dorval d'où on ne peut même pas voir un avion, faute de fenêtres!
À Hong Kong, même les autobus sont construits en hauteur… Je me suis assis au penthouse (2e étage), première rangée, jouissant d'une vue superbe.
Je n'ai pas écouté ces Canadiens rencontrés dans l'avion et habitués de Hong Kong qui, pour aller en ville, m'avaient conseillé de prendre le train, "plus cher, mais plus simple". J'ai plutôt opté pour le bus ("Airbus"), nettement moins cher, tout aussi confortable et, à mon point de vue, encore plus simple puisque le réseau d'autobus couvre de nombreux coins de la ville, nous conduisant pratiquement à la porte de notre hôtel, quel qu'il soit. À bord, des tableaux indicateurs électroniques montrent le nom du prochain arrêt et identifient les hôtels se trouvant à proximité. Impossible de se perdre!
Lorsque le tableau indicateur du bus montra "Caritas Bianchi Lodge", je descendis. Quelques hôtels bon marché à considérer dans ce quartier. Une arrivée nettement plus relax qu'à Bangkok quelques mois plus tôt, un soir pluvieux où j'avais débarqué du bus à l'aveuglette, parce qu'il semblait y avoir beaucoup de touristes alentours, mais néanmoins sans savoir où j'étais…
Visite du Caritas, puis du Booth Lodge voisin (géré par l'Armée du Salut). Je préfère ce dernier, mais la nuit est tout de même à 440$HK (88$CAD). Voilà un prix "budget" pour Hong Kong… Bien sûr, c'est impeccable. Y'a la télé, le frigo, l'air climatisé, même si je n'ai besoin de rien de tout ça.
Me baladant en ville, je n'ai pu m'empêcher de faire des comparaisons avec Bangkok, puisque c'est de là que j'arrivais. Et Hong Kong en est bien différente! Les trottoirs sont larges et dégagés, pavés uniformément et sans obstacles. Au-dessus de nos têtes ne se trouve aucune gouttière dégoulinante. La température est chaude, mais nettement moins suffocante. Idem pour la pollution. L'odeur de la ville est différente. Tout est plus moderne. Rares sont les portes qui ne s'ouvrent pas automatiquement devant soi! Que c'est curieux, grâce à l'avion, de changer d'environnement de manière aussi abrupte!
Le rythme de Hong Kong est frénétique. Même passé 23 heures, les boutiques ne semblent pas en voie de fermer, pas plus que les consommateurs ne semblent être en voie de ralentir leurs achats!
Facile de s'y laisser prendre. On se promène, on observe l'activité, on s'arrête manger un morceau dans une nouillerie, puis on continue encore un peu… Puis on finit par se rendre compte qu'il est déjà très tard!
Le quartier Mong Kok, à Kowloon, est particulièrement électrisant. On y trouve de tout. Des petits cafés et restos sympas, des boutiques de grands noms, des bouibouis chinois. Et ces brillants néons inondant les rues de lumière semblent dire à Times Square d'aller se coucher!
Par curiosité, je suis entré dans un centre commercial remarquable uniquement par un intense va-et-vient. À l'étage, j'ai vite compris qu'il s'agissait d'un haut lieu du piratage: copies de musique, films, jeux vidéos, logiciels en tout genre… Des tas de boutiques aux étalages débordants de copies, qu'on vend apparemment sans la moindre crainte de représailles. Le 3e étage faisait dans le même genre, mais uniquement avec du matériel porno… De quoi satisfaire les plus dépravés!
Hong Kong compte de nombreux parcs ravissants, où jeunes et vieux vont pratiquer les arts martiaux (le taï chi quan semble particulièrement populaires), bavarder en groupe (surtout les vieux), ou écouter la radio.
Je me suis un peu perdu avant d'arriver au Yuen Po, le marché aux oiseaux. La moitié des boutiques étaient hélas déjà fermées à mon arrivée, mais l'odeur de guano, elle, était encore bien présente!
Aujourd'hui est un jour férié, Pâques. Les gens d'affaires ont déserté le centre-ville et ont été remplacés par les domestiques Philippines, elles aussi en congé, venues par milliers y papoter, rigoler, jouer aux cartes et se coiffer mutuellement. Elles seraient 140 000 à travailler à Hong Kong. Et elles sont drôlement plus radieuses que les sérieuses Chinoises qu'on croise habituellement au centre-ville!
D'ailleurs les habitants de Hong Kong se prennent "drôlement" au sérieux! Trop soucieux de leurs possessions matérielles? Selon une étude parue ce matin dans le South China Morning Post, un quotidien local anglophone, 35% des enfants de Hong Kong apprécieraient leurs parents avant tout pour l'argent de poche qu'ils recoivent d'eux… Dans un autre ordre d'idées, un autre article intéressant faisait part d'inquiétudes quant à la capacité de ces enfants à subvenir eux-mêmes à leurs besoins une fois devenus adultes. C'est que les domestiques Philippines font tout: les nourissent, les habillent, portent leur sac d'école, leurs donnent les réponses aux devoirs du cours d'anglais…
Plus tard, lorsque j'ai pris le métro à la station Central, plusieurs petits groupes de Philippines papotant bruyamment sont entrés dans le wagon. À la station suivante, ce sont plutôt des Chinois silencieux qui sont entrés. L'un lisait son journal, l'autre son magazine, l'un lisait sa bd, l'autre jouait sur son téléphone cellulaire (d'ailleurs ici les réseaux sans fil fonctionnent même dans le métro). Pendant ce temps, les Philippines exubérantes continuaient à placoter joyeusement. Curieux contraste. Ces femmes, puisque ce sont elles qui, en partie, élèvent les enfants, peut-être auront-elles une certaine influence culturelle!
Vue de loin, Shek O me paraissait d'abord d'allure méditérannéenne, mais à mesure que je m'approchai des villas luxueuses, elle me paru davantage d'esprit californien, avec la plage, la mer, les rochers, les BMW, les "SUV" n'ayant jamais roulé que sur de l'asphalte, la joggeuse et ses deux Golden Retriever…
En attendant le minibus qui devait me conduire à un accès à la Hong Kong Trail, j'ai remarqué un gadget intéressant: une machine distributrice par télé-paiement. Le client pitonne un code sur son cellulaire et la machine lui sort un Coke… Pratique pour celui qui aurait oublié sa carte à puce à la maison… J'ai oublié de vérifier si la machine prenait la monnaie.
Le Peak Tram, en opération depuis 1888, permet d'effectuer l'ascension du Victoria Peak (également accessible par autobus) jusqu'au belvédère situé à 400 mètres au-dessus de la mer.
Le tramway, bientôt centenaire, reste le moyen le plus amusant de parcourir la ville, surtout assis à l'avant, à l'étage! À bord, ni air climatisé ni tableau indicateur électronique! Un anachronisme rafraîchissant dans cette ville ultra-moderne.