Près de Sukhothai, on fait sécher au soleil des poissons tirés de la rivière Yom.

Extrait sonore : Le vendeur ambulant

Fondée au XIIIe siècle, Si Satchanalai était jadis considérée comme la jumelle de Sukhothai. Moins vaste que Sukhothai, elle n'a cependant rien à lui envier en beauté. Ses ruines, plus négligées et moins visitées, exhalent un air mystérieux et envoûtant. Chaliang, la cité voisine, est encore plus ancienne, ayant été fondée au XIIe siècle sous le règne khmer.

Aux côtés de ces joyaux historiques, la rivière Yom joue de son charme discret. Le cours aux eaux opaques chargées de sédiments paraît presque anodin, mais s'égarer le long de ses méandres, c'est s'ouvrir à une infinité de découvertes!

Depuis la ville de Sukhothai jusqu'au parc historique national de Si Satchanalai-Chaliang, on peut remonter la rivière Yom par un paisible chemin, souvent non pavé, qui va de village en village.

La Yom, c'est depuis des siècles la source de toute la vie de la région. Elle irrigue les rizières environnantes, baigne quantité de poissons, nourrit de nombreuses communautés. La Yom est si généreuse que des digues ont dû être érigées le long de son cours pour en maîtriser les débordements pendant la mousson. Le chemin qui accompagne les méandres de la Yom est en fait la crête d'une longue digue presque ininterrompue de 60 km!

Un pêcheur exhibe son filet, dans lequel sont piégés des dizaines de petits poissons.

Alors que je saisissais la scène, ces pêcheurs fiers de leurs prises, les gens autour rigolaient joyeusement et une femme faisait faire des « hello » à son bébé à mon intention en lui agitant la main. Par cette belle matinée, la joie de vivre était généreuse comme la rivière Yom!

Séchage du riz sur la route.

Le meilleur endroit pour faire sécher le riz, c'est la route! Les rares véhicules sur ce chemin peu fréquenté, pour la plupart de petites motos, n'avaient d'autre choix que de rouler sur le tapis de grains.

Un moine empruntant l'un des ponts suspendus de la rivière Yom.

Extrait sonore : Sur le pont suspendu

La rivière Yom est enjambée par plusieurs ponts suspendus griçant et claquant sous les pas des piétons ou les roues des motos qui les empruntent. À l'une des extrémités de chacun de ces ponts, on trouve toujours un monastère.

La fenêtre de ma chambre d'hôtel, à Sawankhalok.

Ce qui devait être une courte randonnée matinale de 35 km, de Sukhothai à Sawankhalok, se termina plutôt en fin d'après-midi après 55 km! C'est que suivre et observer d'aussi près les méandres de la rivière Yom a facilement eu pour effet d'ajouter quelques kilomètres et quelques heures de cyclisme au plan initial!

Alors qu'à Sukhothai j'avais bénéficié du confort facile d'une guest house joyeuse où on préparait même une excellente bouffe, cette fois j'étais dans un fade hôtel chinois fréquenté par de quelconques représentants de commerce itinérants, un genre d'endroit respirant la solitude. Le réconfort, c'est au petit marché nocturne de Sawankhalok que je le trouvais, avec son orgie de bouffe et sa petite foule effervescente.

J'ai été étonné; dans cette petite ville située à mi-chemin entre deux sites du patrimoine mondial de l'UNESCO, Sukhothai et Si Satchanalai, il n'y avait aucun touriste en vue! Beaucoup de routards regardent la Thaïlande avec dédain, la considérant trop touristique alors que, et c'en était encore la preuve, il est pourtant facile de s'écarter du cauchemar de l'industrie touristique.

Deux motocyclistes traversent la rivière Yom sur un étroit pont suspendu, à Sawankhalok.

En faisant de Sawankhalok ma base, la Yom m'accompagnerait encore pour quelques jours, puisque je devais la longer quotidiennement sur 25 km, jusqu'à Si Satchanalai, puis rentrer à peu près par le même chemin après une journée d'exploration des ruines.

En effet, je pouvais varier l'itinéraire, mais le trajet le plus court entre Sawankhalok et le parc historique se trouvait du côté ouest de la Yom, où le chemin riverain n'était complètement interrompu que sur deux ou trois kilomètres. Sur la rive est, moins développée, le chemin s'arrêtait en au moins deux endroits, contraignant à rejoindre l'insipide route 101.

Les ruines du mur d'enceinte du Wat Thung Setthi, dans le parc historique de Si Satchanalai.

Les vieux murs du Wat Chao Chan, à Chaliang, encore partiellement recouverts de stuc.

Le Wat Chom Cheun, à Chaliang.

Wat Chom Cheun.

Le prang et quelques cocotiers du Wat Phra Si Rattana Mahathat, à Chaliang.

Une sculpture étrange surplombe l'entrée est de l'enceinte du Wat Phra Si Rattana Mahathat.

Un bouddha de stuc de style sukhothai, au Wat Phra Si Rattana Mahathat.

La main d'un bouddha du Wat Phra Si Rattana Mahathat, à Chaliang.

Le prang du Wat Phra Si Rattana Mahathat (à gauche) est bordé d'un imposant chedi.

La pêche dans la rivière Yom, tout près des ruines de Chaliang.

La pointe du chedi du Wat Khao Phanom Phloeng, à Si Satchanalai.

Extrait sonore : Chant aigu

Le chedi du Wat Khao Khiri, à Si Satchanalai.

La base du chedi du Wat Suan Kaeo Utthayan Noi.

Une partie du muret de latérite qui entoure le Wat Suan Kaeo Utthayan Noi, à Si Satchanalai.

Des restes de statues envahies par la végétation, à Si Satchanalai.

Le Wat Chedi Khao Yot, à Si Satchanalai.

L'escalier de latérite du Wat Khao Yai 2, à Si Satchanalai.

Une partie de la très large base du chedi du Wat Khao Ain.

Le chedi du Wat Sa Kai Nam.

La base du chedi du Wat Khao Ain s'est affaissée avec le temps, causant l'inclinaison du monument.

Un mur d'enceinte en ruine, à Si Satchanalai.

Le Wat Rahu, à Si Satchanalai.

Le Wat Lak Muang, l'un des monuments situés à l'intérieur des fortifications de Si Satchanalai.

Les délicates décorations de stuc du Wat Nang Phaya.

Quelques colonnes tiennent encore, dans l'enceinte du vaste Wat Nang Phaya.

La pointe du chedi du Wat Chang Lom.

Un regard parmi les ruines du Wat Chedi Chet Thaew, le plus imposant complexe de Si Satchanalai.

Wat Chedi Chet Thaew.

Un bout de stuc s'accroche encore à une paroi de latérite.

Quelques monuments du Wat Chedi Chet Thaew.

Le chedi du Wat Khao Suwan Khiri, au faîte d'une colline située à l'intérieur des fortifications de Si Satchanalai.

Pour une fois, j'ai été raisonnable et j'ai quitté le parc historique avant 17h, évitant la noirceur et les petites mouches qui, dès le coucher du soleil, venaient toujours se mêler dans mes cheveux ou se coller sur ma peau moite de cycliste…

Évidemment, ça ne m'a pas permis d'éviter les sempiternels chiens se lançant à ma poursuite… L'un d'eux, particulièrement tenace, est arrivé à me talonner. Celui-là, il me poursuivait pour la troisième fois en autant de jours! Alors, tout en continuant à pédaler, je l'ai laissé s'approcher suffisamment pour pouvoir le menacer de coups de pied sur le museau. Ça ne semblait pas beaucoup l'impressionner, alors il a fini par manger un vrai coup de pied dans les dents! Il a aussitôt abandonné la poursuite; « Y rigole pas ce cycliste! », a-t-il probablement pensé. Le pauvre, il venait d'être puni pour tous ces chiens exaspérants lancés derrière moi au cours des derniers mois! Après cette douce revanche, j'étais d'une bonne humeur débordante, répondant avec entrain à tous les « hello! » et « farang! » (autrement lassants par leur grand nombre) que m'adressaient les gens en chemin!

Le meilleur truc contre les poursuites canines est heureusement moins violent et consiste à les prévenir de notre passage en faisant du bruit. Ça ne marche pas toujours, mais les chiens se sentent plus en contrôle et moins irrités quand ils nous ont vu venir!

À propos des auteurs

De plus en plus, je m'intéresse aux lieux plus qu'aux paysages. Au-delà de l'attrait esthétique, ce sont les usages évidents ou cachés des lieux, leurs histoires passées ou futures, qui susciteront mon intérêt. Cette étincelle m'est indispensable et explique probablement pourquoi je pratique relativement peu la photographie au quotidien. L'étincelle ne peut s'allumer que lorsque je mets tout le reste de côté pour m'abandonner à la photo, en me laissant porter par le moment présent.

J'ai mille projets photographiques en tête, mais je ne les réalise jamais car une fois le repérage et la réflexion faits, une partie de la motivation est déjà consommée. Je préfère la démarche plus spontanée, où je passe en «mode photo» et me laisse inspirer par ce que je découvre. Ainsi, s'il émerge parfois des ensembles cohérents parmi mes images, ceux-ci s'avèrent le plus souvent accidentels! Je n'ai rien contre l'approche calculée, au contraire j'admire ceux qui la pratiquent, mais ça ne marche pas pour moi, peut-être parce que je dois déjà faire amplement preuve de discipline et de patience dans les sphères professionnelles de ma vie. J'exige de la photographie qu'elle me fasse rompre avec mon quotidien.