Aux abords de la route 430.

Après une semaine dans les grands espaces du Labrador, voilà que notre groupe de quatre aventuriers est immobilisé, faute de places disponibles sur le traversier de 10h45 faisant la liaison entre Blanc-Sablon, Québec et St. Barbe, Terre-Neuve. Les voyageurs sont fort nombreux pour le long week-end qui s'amorce et les travailleurs locaux ont priorité sur les touristes. Certains touristes qui attendaient dès 4h30 n'ont pas pu obtenir de billets pour la traversée de 6h et passent donc devant nous. En recevant finalement nos billets pour le bateau de 15h45, nous nous consolons tout de même à l'idée d'avoir continué à dormir comme des marmottes pendant que d'autres s'étaient levés avant le soleil pour une bête attente de plus de six heures.

Ainsi, c'est seulement à 18h15 que nous débarquons enfin à St. Barbe. Avec une courte semaine devant nous pour explorer l'immense île de Terre-Neuve, voilà qui n'allait pas régler notre manque de temps! Dans le but de profiter du parc national du Gros-Morne aussi longtemps que possible, nous prenons la décision déchirante de descendre directement la route 430 jusqu'au Gros-Morne, presque sans nous arrêter.

À St. Pauls, aux portes du parc national du Gros-Morne, nous nous permettons un arrêt au supermarché et en profitons pour admirer le mince croissant de lune et le coucher du soleil.

Au pied du Gros-Morne.

Après la longue route et une nuit réparatrice au camping de Green Point, notre base pour les prochains jours, nous nous lançons sur le sentier James Callaghan. Après environ une heure de marche très facile, la vue des flancs du Gros-Morne commence à nous donner une bonne idée de l'allure que prendra l'ascension : abrupte et rocailleuse!

Randonneurs à la base du Gros-Morne.

Une coulée rocheuse fait office de sentier vers le sommet du Gros-Morne. Bien avant d'atteindre le sommet, nos efforts sont déjà récompensés par une vue magnifique. 

Même si cette voie demande un bon effort physique, il vaut mieux monter de ce côté et descendre doucement par l'autre versant, puisque le trajet inverse serait plutôt casse-gueule.

Au loin, le East Arm et le South Arm, deux bras de mer de la Bonne Baie. Le South Arm est au pied du massif des Tablelands, dont la couleur orangée caractéristique est ici masquée par la teinte bleutée de l'atmosphère chargée d'humidité. Les Tablelands sont constitués de roches très anciennes du manteau terrestre rarement visibles à la surface.

Le guide officiel du parc national du Gros-Morne indique que les roches de la région représentent «l’une des meilleures illustrations au monde de la tectonique des plaques». Il y a quelques centaines de millions d'années, ces roches étaient enfouies sous la mer, puis elles ont été poussées vers la surface par la collision des continents. Plus récemment, l'action des glaciers a sculpté l’endroit et mis à nu les roches que nous pouvons aujourd'hui observer.

Le sommet du Gros-Morne est un vaste plateau rocheux.

Malgré une altitude relativement modeste de 806 mètres, le Gros-Morne est le deuxième plus haut sommet de l'île de Terre-Neuve, après le mont Lewis (814 m). Pour les randonneurs, la dénivellation reste significative puisque le sentier débute presque au niveau de la mer.

À l'arrière-plan d'un randonneur, une partie des monts Long Range. Les monts Long Range, dont fait partie le Gros-Morne, sont en fait le prolongement septentrional de la chaîne des Appalaches.

La vue du haut des falaises surplombant le Ten Mile Pond. Cette vallée glaciaire aux allures de fjord n'est, techniquement, pas un fjord puisque son bassin d'eau est au-dessus du niveau de la mer.

Trois plateformes de camping rustique sont disponibles sur le site de Ferry Gulch, relativement abritées des vents et tout près de ce lac «suspendu» doté d'une belle vue sur la vallée en contrebas. J'en prends bonne note pour une prochaine visite!

La toilette du site de Ferry Gulch est dotée d'une porte… et d'un excellent système de ventilation!

Sur le flanc du mont Gros-Morne.

Le flanc d'une colline voisine.

Après avoir complété la boucle, nous pouvons admirer à nouveau la coulée par laquelle nous avons, quelques heures plus tôt, grimpé jusqu'au sommet.

Pour le reste du sentier, nous revenons sur nos pas parmi les épinettes rabougries.

À propos des auteurs

De plus en plus, je m'intéresse aux lieux plus qu'aux paysages. Au-delà de l'attrait esthétique, ce sont les usages évidents ou cachés des lieux, leurs histoires passées ou futures, qui susciteront mon intérêt. Cette étincelle m'est indispensable et explique probablement pourquoi je pratique relativement peu la photographie au quotidien. L'étincelle ne peut s'allumer que lorsque je mets tout le reste de côté pour m'abandonner à la photo, en me laissant porter par le moment présent.

J'ai mille projets photographiques en tête, mais je ne les réalise jamais car une fois le repérage et la réflexion faits, une partie de la motivation est déjà consommée. Je préfère la démarche plus spontanée, où je passe en «mode photo» et me laisse inspirer par ce que je découvre. Ainsi, s'il émerge parfois des ensembles cohérents parmi mes images, ceux-ci s'avèrent le plus souvent accidentels! Je n'ai rien contre l'approche calculée, au contraire j'admire ceux qui la pratiquent, mais ça ne marche pas pour moi, peut-être parce que je dois déjà faire amplement preuve de discipline et de patience dans les sphères professionnelles de ma vie. J'exige de la photographie qu'elle me fasse rompre avec mon quotidien.